8 avr. 2010

Un numide en Amérique du Nord - 48 -

La culture au Québec -1-
De la politique et de l’industrie qui prime sur l’autre ?

Le Numide, il y a quelques mois tu m’avais parlé de la perception des cultures portées par les néo québécois et de leur perception par les québécois. J’aimerais connaître ton sentiment au sujet de la culture au Québec, est-elle partagée ou exclusive aux Québécois et comment est-elle comprise par les uns et par les autres ?
Question très vaste et très ouverte. Je ne maîtrise pas tous les paramètres de fonds pour avancer des assertions ou suggérer des pistes de réflexion mais comme citoyen porteur d’une autre culture je peux me laisser aller et commencer par la facette de l’immigration vue par les québécois, tel que je la perçois, puisque s’il y a divergences, hétérogénéités et altérités, c’est à ce niveau qu’elles commencent.
J’ai appris par l’expérience et le temps dans un autre espace culturel – le mien c’est à dire l’Algérie – qu’au moins six milieux influent sur les identités et les cultures nationale et individuelle.
Peux-tu me les citer ? Il y a en premier lieu la famille suivie de l’école, il y a ensuite l’histoire générale du pays, et bien entendu je rapporte le tout à la culture et l’histoire personnelle de chaque individu. Il faut souligner que l’influence du milieu avec ses différentes facettes est prépondérante dans certaines situations. À titre indicatif je citerai le modèle de scolarisation et son contenu, l’organisation de la famille, l’idéologie et la politique majoritaires, le travail, la religion. Tous ces paramètres et leurs influences forment la personnalité, l’identité, le profil et l’image des individus et de la société.
Si j’examine le fait que le Québec, et par extension le Canada, reçoit des milliers de personnes en provenance des quatre continents (Afrique, Amérique Latine, Asie et Europe) et formant diverses ethnies, il se trouve que certains pensent que c’est un trop gros risque qui va diluer la culture locale et il y a ceux qui considèrent au contraire que cela va renforcer ses fondements et que c’est le meilleur moyen de l’enrichir.
Le Numide, dis moi ce que cela change pour les uns et pour les autres ? De mon point de vue la problématique est porteuse de plusieurs aspects parmi lesquels les valeurs et les différences culturelles. Lorsqu’elles sont mal expliquées, mal comprises, mal intégrées et que la diversité est fondée sur des valeurs non partagées, méconnues par les citoyens du Québec, ça débouche forcément sur des clivages, des frictions, des malentendus qui créent des oppositions et des ruptures, souvent là où l’on s’y attend le moins.
De l’autre côté il y a les néo québécois qui viennent avec un package bien ficelé et un esprit de découverte aiguisé par conséquent d’ouverture assez grande. Ils ont la mesure de l’adaptation et de l’ajustement, mais très vite ils se rendent compte que ce sont les différences, les spécificités, les caractéristiques et les particularités qui les singularisent et qui font qu’ils sont perçus comme des groupes exotiques et éloignés de ceux qui les reçoivent.
La distance s’implante entre eux et les gens du pays d’accueil. Malgré l’esprit d’ouverture dont font montrent les québécois il arrive un moment où ils restent dans leur bulle. Ce qui pose problème c’est que ceux qui sont sensés vulgariser les différences pour les faire accepter se mettent à jouer un rôle aussi ingrat que celui du maître qui focalise plus sur les divergences admises comme étant des faiblesses et moins sur les points de jonctions comme étant des forces.
Peut-on envisager quelque chose d’uniforme et d’harmonieux et comment faire face à ces séparations dés lors que le plus grand déficit de ce pays réside dans sa démographie en déclin ?
Il faut en premier lieu arrêter d’expérimenter des démarches qui n’en finissent pas de se renouveler et décourager les plus tenaces. J’ai assisté il y a quelques années de cela à un colloque sur l’intégration des nouveaux arrivants, au cours des débats, un latino-américain, arrivé dans les années ‘’80’’ a déclaré document à l’appui qu’il a assisté, 17 ans plutôt, à une rencontre qui portait sur le même thème. Les conclusions étaient exactement les mêmes que celles qui se dessinaient pour celui-ci. Crois-tu que son intervention a mis mal à l’aise les organisateurs ? Pas du tout. Aucune réaction. Aucun commentaire. Ou du moins il y en a eu une : Le silence. Un silence profond qui était marquant. Il a fallu que ce soit lui qui redonne la parole aux participants pour relancer la discussion.
Le Numide se tait quelques secondes et m’invite à méditer sur ce que ce monsieur à du vivre au plan de l’ajustement de sa culture personnelle pour s’intégrer ou pour au contraire s’isoler.
A suivre….

Ferid Chikhi

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