12 juin 2010

Un Numide en Amérique du Nord - 59 -

L’adaptation, les ajustements et l’intégration ?
Valeurs, rythme de vie, pratiques sociales, vie culturelle – 1 -
N’as-tu pas été trop fort avec lui ? Il me semble que tu t’es emporté. Ce que tu lui as dit est agressif ? Le Numide se tut quelques secondes me regarda dans les yeux et poursuivit…
Oui ! Je l’ai été. Je considère que parfois avec des personnes qui disent transmettre le savoir aux générations futures, le verbe simple à lui seul ne suffit pas. Il faut mettre l’emphase là où c’est nécessaire et les point sur les ‘’I’’.
Comment expliques-tu cette attitude et ces comportements qui font que des personnes pourtant, reconnues comme étant modernistes, progressistes et  ouvertes d’esprit se retrouvent dans une situation presque de régression ?
De régression, le ‘’presque’’ est de trop. Je ne saurais répondre totalement à ta question cependant, il me semble qu’il y a, à la fois de la technologie, de la psychologie, de la sociologie et de l’anthropologie. Il y a à mon sens un élément qu’il faut analyser, il s’agit de savoir si quelqu’un qui est qualifié de meilleur parmi les meilleurs dans son pays d’origine peut le rester ailleurs ? Il y a plusieurs réponses possibles et je retiens la suivante, les règles et les critères d’excellence ne sont pas les mêmes partout par conséquent la classification est différente ; d’autre part certains avancent le fait qu’à leur arrivée les immigrants subissent un choc culturel. Ils limitent ce choc à la différence entre la pauvreté pour ne pas dire l’indigence intellectuelle des pays d’où ils viennent et le confort du pays d’accueil. J’y adhère mais ce n’est qu’un élément parmi tant d’autres.
Le Numide peux-tu être plus précis ? … J’y viens. A titre indicatif, les apprentissages académiques et universitaires ainsi que la technologie dans un pays comme le Canada influent sur les valeurs, les comportements, les attitudes des gens. La société toute entière change au fur et à mesure que les innovations, les inventions, les créations scientifiques sont mises sur le marché à la portée de tous. Le tout est écrit, analysé, passé au crible par des critiques éclairantes. Citons le secteur de l’industrie automobile et au-delà de celui des sciences appliquées, il n’en est pas, seulement, un de montage ou d’utilisation, mais les mises en marché  exigent des validations pour leur acceptation par le public. Elles font l’objet d’un contrôle strict et d’une concurrence acharnée entre celles de l’Amérique du nord, des pays asiatiques et des pays européens, etc. par ailleurs, Internet, aide à la progression des groupes sociaux.
Comment expliques-tu cette avancée ? On vit à l’heure des transferts instantanés non seulement de l’information mais surtout du savoir, du premier pallier de l’acquisition des éléments de base de la connaissance avec l’outil informatique c'est-à-dire au niveau des écoles jusqu’au pallier professionnel. Pourtant, et c’est là un paradoxe, au Québec, l’école est soumise à des critiques virulentes de la part d’un grand nombre de citoyens qui considèrent que si des enfants quittent les bancs de classe (environ 40%) c’est que tout va mal. Des réformes sont mises de l'avant et elles aboutissent.
Pour les néo québécois, presque tous vivent un déphasage exception faite des femmes et des enfants qui  s’adaptent avec une rapidité étonnante alors que les hommes n’arrivent pas à le faire à la même vitesse malgré le fait qu’ils sont les chefs de familles, souvent et seulement théoriquement plus qualifiés. Un des chocs les plus visibles c’est la perte de ce statut de chef de famille ou pour le moins sa fragilisation. Il ne faut omettre qu’au plan social les lois du pays prônent l’égalité des sexes et la protection des enfants. Paramètres que les hommes n’intègrent pas et n’acceptent pas, privilégiant l’éducation – conservatrice - qu’ils ont importée avec eux et prétextant qu’elle est meilleure que celle du pays d’accueil. D’où un décalage entre les pratiques habituelles avec lesquelles ils arrivent et les nouvelles qu’ils découvrent. Là, c’est un véritable choc non pas culturel mais ‘’mental’’ difficile à vivre.
Souvent je me pose la question suivante : comment expliquer qu’avec leurs qualifications, leurs compétences, leurs expériences professionnelles ils vivent ce choc culturel ravageur alors qu’ils ont choisi de leur propre gré de changer de pays donc de changer de paradigme ? Récemment j’ai rencontré des compatriotes, beaux parleurs, critiques et observateurs de ce qui leur semble être des failles sociales et des bizarreries du pays d’accueil. J’ai, par contre, été surpris qu’en matière de connaissances acquises ils ne sont pas en mesure d’exprimer par écrit et souvent même verbalement le savoir acquis à l’école avant leur arrivée…
Le Numide s’arrête d’un coup et comme à son habitude prend une profonde inspiration et l’instant d’après c’était celui de sa méditation lorsqu’il me conte ses réflexions.
À suivre…
Ferid Chikhi

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