11 nov. 2009

Un Numide en Amérique du Nord - 18 -

Le Berlin des Ponts contre le Berlin du Mur
En souvenirs de mon passage à Berlin en novembre 1999

Le Numide, l’Allemagne, l’Europe, le monde entier se souviennent et fêtent la chute du mur de Berlin. Il y a une dizaine d’années de cela tu m’as parlé de ta visite à Checkpoint Charlie et au pont de la Bornholmer Strasse qu’est ce que cela évoque pour toi ?
‘’De la joie mêlée à de la tristesse’’. Un silence. Des souvenirs qui remontent à la surface. Une sérénité qui s’affichent et Le Numide reprend son commentaire. ‘’ Oui, mon travail m’a amené à vivre trois années consécutives en Allemagne. J’y ai passé des moments inoubliables, tant avec les allemands qu’avec les environnements culturel et historique de ce pays. Au début des années ‘’90’’ les prémices du nouveau Berlin pour ne pas dire de la nouvelle Allemagne étaient palpables. Mais d’abord pour le mur, cela évoque pour moi des mots ignobles : fascisme, séquelles résurgentes de l’oppression permanente de la dictature, de l’oppression et de la répression.

Ça me rappelle qu’hier encore, en Algérie, il y avait les barbelés des lignes Challe et Morice. Infestées de mines anti personnelles. Aujourd’hui encore, elles poursuivent leur œuvre mortelle. Zone tampon nous a-t-on-dit. Mais leur minage est passé sous silence. Seule la déflagration nous rappelle le handicap qui nous guette ça et là. Elles handicapent et tuent encore et encore des enfants et tous ceux, y compris les animaux, qui osent s'égarer là ou elles existent encore.

Hier le mur de Berlin, le rideau de fer, aujourd'hui encore les murs des Corées et de Cisjordanie. Les murs à Chypre ou à Ceuta.  Mur de la honte pour les uns mur de protection antifasciste, anti terroriste et anti immigration pour les autres. Je me suis toujours demandé pourquoi construire des murs qui nous brouillent, nous coupent, nous désunissent, nous divisent, nous éloignent, nous fragmentent, nous morcellent alors que nous sommes semblables ?

Dans ma jeunesse j’avais appris que la construction d’un mur avait pour finalité la protection du danger.  Mais en vieillissant je me rends compte que ça n’est pas toujours la vraie raison. Qui peut voir ce qu’il y a derrière un mur dés lors que la vision est obstruée et que la circulation est restreinte, empêchée, interdite ?
Pourquoi construire des murs qui nous séparent et qui nous cachent les uns aux autres devenant à la longue le cauchemar réel pour les uns et les autres et l’expression de la haine de l'homme à l'égard de son semblable ?’’

Que proposes-tu à la place ? ‘’À vrai dire je dirai qu’il ne faut plus construire des murs qui séparent et des murs qui cachent. Les murs qui existent encore pour ces idées doivent tomber. En allant à Berlin je suis passé sur un pont pour rejoindre l’autre partie de la ville. Alors pourquoi ne pas construire des ponts qui nous unissent, nous rassemblent et nous lient les uns autres ? Qui peut dire ce qu’il trouvera lorsqu’il aura passé le mur alors que le pont nous invite à nous rapprocher les uns des autres en connaissance de cause ?
Le mur nous incite à crier, à fulminer, à geindre, à pleurer, à récriminer, à reprocher à ses constructeurs notre sort et à aimer, à envier, à convoiter, à désirer celui de  ceux qui se trouvent de l’autre côté.  Le mur de Berlin est tombé et c’est par pont de la Bornholmer Strasse que nous nous sommes retrouvés à Check point Charlie. Le pont nous convie à dialoguer, à communiquer, à se parler, à se comprendre, à s’écouter, à franchir les étapes, les espaces vides qui nous séparent, les ponts relient.’’ Un silence suit cette réflexion. Une transition vers un autre thème s'annonce et se prépare.
Ferid Chikhi

6 nov. 2009

Un Numide en Amérique du Nord - 17 -

 Ne m’appelle pas étranger…

De Rafael Amor

 Le Numide, comment expliques-tu l'exil, l’expatriation, l'immigration? Là encore, une réaction à peine perceptible, quelque part indiscernable sur son visage, quelque chose de furtif…il se résout pourtant à commenter.
Je ne saurais tous les expliquer en quelques mots. Ils font partie du même mouvement régulier de l’humanité vers son futur. Ils sont nombreux celles et ceux qui les vivent comme synonymes de séparation brutale d’une famille, d’un pays, d’éloignement des proches. Dans le pays d'accueil ils sont aussi synonymes d’isolement, de rejet, d’exclusion.


Et pour cause un grand nombre n’arrivent pas à s’adapter au monde nouveau qui les accueille. Aux personnes qui les attendent…Le pire se vit quand commence la rencontre avec l’autre. Un autre qui à un moment ou à un autre de son existence ou celle de ses ancêtres est venu d’ailleurs.  Elles et ils sont arrivés en premier de la même façon que les suivants par des chemins difficiles. Mais pour elles et pour eux ces nouveaux arrivants sont des étrangers et étranges. C’est là que le bât blesse. 

Rafael Amor, un chanteur Uruguayen a su chanté l’étranger. Je pense que ces vers sont significatifs de ce que ressentent les ''intrus face aux originaires''. 
     
''Ne m'appelle pas étranger parce que ta route m'a attiré et parce que je suis né dans un autre pays, parce que j'ai connu d'autres océans et appareillé à d'autres ports.
Mais les mouchoirs voletant pour se dire adieu sont les mêmes,
Comme sont identiques les yeux humides de larmes
De ceux que nous laissons.
Les prières et l'amour de ceux
Qui espèrent notre retour sont les mêmes.


Ne m'appelle pas étranger.
Tous, nous pleurons avec la même voix et partageons la même fatigue,
que nous traînons derrière nous depuis le commencement des temps.

Quand les frontières n'existaient pas encore,
Bien avant l'existence de ceux qui divisent et tuent,
De ceux qui vendent nos rêves et qui auraient,
Un jour, inventé la parole ''étranger''.

Ne m'appelle pas étranger.
C'est un mot triste, un mot froid qui évoque l'exil''.

Après ces vers, le Numide, poursuit en insistant ''sais-tu ce qui me rassure le plus ? Et bien, c'est la chaleur avec laquelle ils arrivent dans le pays qui leur ouvre ses bras. Cela finit par avoir raison des rejets, de l'exclusion et des autres qualificatifs pratiqués pour les indexer. Cela se fait dans tous les cas parce que dans leur nouveau pays il existe des femmes et des hommes qui savent ce que les mots hospitalité, partage, écoute veulent dire''.  
Ferid Chikhi

Titre original du poème : ''No me llames estranjero''

Auteur : Rafael Amor

4 nov. 2009

Un Numide en Amérique du Nord - 16 -

Le futur de tes descendants est inscrit
dans le passé de tes ancêtres

Le Numide, j’ai une question un peu particulière que je voudrais te poser avant de revenir à New York et au Jardin de la Paix. Es-tu un nostalgique du temps passé, du présent ou bien es-tu quelqu’un qui vit pour son avenir, son futur ?

Un clignement des yeux montre qu’il est réellement surpris par ma question. Avec un étonnement non feint il me demande ‘’Pourquoi une telle question ?’’ J’ai eu l’opportunité de constater que lorsque tu évoques tes souvenirs il y a des détails qui sont encore vivaces dans ton esprit, tu fais le lien avec le présent et tu te projettes dans le futur. Alors je me suis demandé comment tu conceptualises le temps ?

‘’Je te vois venir. Disons que, pour moi l’espace par où je passe une fois n’est plus le même lorsque mes pas m’y conduisent une seconde fois. Il y a la période et le moment qui ne sont plus les mêmes - le matin, l’après midi, le soir, la nuit sont des intervalles où tout change. Ce sont des changements naturels qui se succèdent mais ils sont différents par leurs caractéristiques. Penses aux vagues de la mer ou de l’océan, crois-tu qu’elles sont les mêmes lorsque la succession de roulis est presque permanente ?


En fait, il n’y a qu’une faculté qui ne change jamais ou presque pas : c’est la pensée que j’ai pour les miens, bien entendu et avant tout pour mes parents et l’ensemble de ma famille. Par ailleurs, je me suis toujours demandé s’il existe quelqu’un qui revient au même endroit et au même moment avec le même état d’esprit ?  Même chez moi, lorsque je quitte le matin et que j’y reviens à un autre moment de la journée, quelque chose a changé. 

Si ce n’est pas l’aspect physique de cet endroit qui peut être est figé, statique, sans vie, c’est moi qui ai changé. Je ne suis plus la même personne. J’ai vieilli de quelques minutes, de quelques heures, de quelques instants. J’ai eu une expérience de vie qui n’est plus la même que celle que j’avais au moment où j’ai quitté ce lieu.

J’ai vu, entendu et touché bien des personnes; j'ai senti des parfums et des odeurs et j'ai goûté des saveurs qui sont en changement permanent;  j'ai aussi touché bien des objets statiques et sans vie. 

Un de mes aînés m’a dit, ton passé et ton présent se fondent sur ce qu’a été le futur de tes ancêtres et si tu veux être en phase avec eux fais de ton futur non par le passé et le présent de tes descendants mais leur futur.’’

Comme toujours et de nouveau la sérénité est là…accompagnant la réflexion...

Ferid Chikhi

Un Numide en Amérique du Nord - 378

  Pour un Québec émancipé et indépendant ! La société des Québécois et les Sociétés d’immigrants !? Depuis quelques mois, les discussions vo...